Message de Georges PRAT
J’ai rencontré Maurice Allais pour la première fois en Octobre 1971 à l’université de Nanterre lors d’un un exposé introductif à ses enseignements en DEA (actuellement, Master 2) sur « l’économique en tant que science ». A l’aide de nombreuses projections graphiques assez convaincantes, il défendait l’idée qu’il existe dans les sciences sociales des « régularités numériques » aussi frappantes que dans les sciences physiques. Par rapport à tout ce que j’avais appris durant quatre années d’études, j’avoue avoir été sous le choc. J’étais même émerveillé que de tels phénomènes puissent exister, une nouvelle porte s’ouvrait dans mes études de « science économique » où le mot « science » prenait désormais tout son sens, justifiant pleinement l’idée d’une activité de « recherche » en économie.
Ayant donc postulé pour suivre les cours et séminaires de Maurice Allais, et ayant eu son accord après une longue audition – il fallait travailler sur un sujet de son choix, c’était à prendre ou à laisser – j’ai préparé mon mémoire de DEA sous sa direction et ensuite poursuivi sur la préparation d’une thèse de doctorat, puis, sur sa suggestion et avec son appui, j’ai pu être recruté en tant que chercheur au CNRS. Au cours de ces années, Maurice Allais m’a fait découvrir mon goût pour la recherche et m’a enseigné la nécessité de la rigueur. C’est dire l’importance de la dette contractée envers lui. Encore faut-il ajouter ma gratitude envers Mme Jacqueline Allais qui, très dévouée, jouait un rôle très important de transmission entre le Professeur Allais et ses élèves.
Indépendamment de cette histoire personnelle, il n’est bien sûr pas douteux que Maurice Allais ait été un homme d’exception. Au-delà de son œuvre scientifique, cela se percevait très vite avec la personne : une culture générale considérable, une capacité à voir les points faibles des théories dominantes (une particularité est qu’il passait plus de temps à enseigner ses propres théories qu’à enseigner les théories établies par d’autres), une capacité inventive hors norme pour élaborer des modèles afin de montrer que, derrière la complexité des faits observables, il peut exister une permanence dans les comportements des agents économiques, et finalement un goût immodéré pour la recherche, goût qu’il gardera jusqu’à son dernier souffle et qui lui aura probablement coûté par ailleurs des sacrifices.
Pour toutes ces raisons, lorsqu’on m’a fait l’honneur de me le proposer, j’ai accepté avec enthousiasme d’être membre du Conseil Scientifique de la Fondation Maurice Allais et de participer au jury du Prix Maurice Allais de science économique.
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